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7 février 2008

Chronique

Du Vodou bradé au Centre culturel français

 

Fortuné Sossa

 

Le Vodou est bradé au centre culturel français de Cotonou. Gbahoundjo…! Gbahoundjo…! Gbahoundjo…! Le Vodou est cédé comme de petits pains payés en euros dans cette galerie à blanche senteur. Cent mille, cent cinquante mille, deux cent mille... francs Cfa. Les prix sont à la portée des bourses habituées à l’achat de ces produits dont la valeur ne peut être quantifiée. Le Vodou est bradé au centre culturel français de Cotonou et c’est vrai. C’est tristement la vérité.

Depuis quelques jours en effet, une exposition se tient dans l’espace Joseph Kpobly de ce centre sous le titre «Trésor d’Afrique: exposition vente d’objets d’art et d’artisanat béninois». Plus frappant à vue d’œil, il est inscrit: «Carte blanche à l’antiquaire Justino de Medeiros». Et le spectacle est désolant. Le spectacle qu’offrent les pièces exposées prêtes à être emportées est douloureux. Il est vrai que ce sont des objets d’art et d’artisanat. Mais pas des moindres. Ce sont des objets authentiques. Du Lègba dans sa majestueuse virilité, du Assin, des masques Guèlèdè et d’autres divinités qui font du Bénin le berceau du vodou.

Des objets sacrés cédés à vils prix au centre culturel français de Cotonou. Le drame est que ce lieu est a priori fréquenté par les Blancs (les Français en premier et les autres nationalités européennes ensuite). Des gens friands d’objets d’art et d’artisanat originaires d’Afrique. Le Bénin étant le berceau du Vodou, il est devenu alors une destination privilégiée pour eux. Ces acheteurs potentiels emporteront les œuvres chez eux pour les revendre aux galeristes à des sommes faramineuses. Ainsi, l’objet vendu par l’antiquaire Justino de Medeiros à deux cent mille francs peut être revendu en Europe à plusieurs millions de francs Cfa. Alors, non seulement, ces objets seront sortis du pays pour choir dans d’autres pays et devenir la propriété d’autres personnes, mais également des acheteurs en auraient profité pour faire de bonnes affaires, de très bonnes affaires.

L’on se souvient que le Bénin souffre du pillage d’un nombre inestimable d’objets précieux qui faisaient la richesse des royaumes. Un pillage effectué au moment où le pays, alors Dahomey, était gouverné par les colonisateurs que furent les Français. Les débats aujourd’hui tournent autour du processus à enclencher pour le retour de ces milliers d’œuvres qu’ils détiennent chez eux. Le musée des Arts premiers, le musée du Quai Branly… sont autant de noms qui révoltent. Car, en des lieux comme ceux-là se trouvent stockés la plupart des objets qu’ils nous ont volés ou emportés de force. Pour ne pas nous les rendre, ils évoquent une affaire de défaut de conservation des œuvres en Afrique. Heureusement que le Bénin n’est plus à ce stade. Dans la plupart de nos musées aujourd’hui, la conservation des œuvres d’art et d’artisanat se fait suivant les normes internationales. Donc il est intolérable qu’on permette encore que des objets quittent le Bénin pour l’Europe ou pour tout autre continent.

De mon point de vue, Justino de Medeiros aurait pu faire juste une exposition de ces objets qu’il a passé certainement de nombreuses années à collectionner. Mais, si tant est qu’il tient à s’en débarrasser, il aurait pu les proposer au ministère béninois en charge de la culture qui est sensé œuvrer pour la sauvegarde du patrimoine culturel et cultuel national. A défaut du ministère de la culture, il aurait pu faire directement les propositions à des musées thématiques qu’il y a dans le pays. L’essentiel est de faire en sorte que ces œuvres ne quittent pas le pays. Car, tel que ça fonctionne, il arrivera un moment où le Bénin, berceau du Vodou, n’aura rien à faire valoir de sa richesse endogène. Déjà que des objets disparaissent de nos musées, notamment des palais royaux d’Abomey, sans laisser de trace, si les collectionneurs privés doivent vendre à des étrangers ce qu’ils ont amassé, il y a lieu alors de s’inquiéter. A cet effet, je voudrais interpeller les autorités en charge de la préservation du patrimoine national en l’occurrence le ministre de la culture, Soumanou Toléba afin que des actions soient menées en direction de l’antiquaire pour qu’il réoriente l’objet de son exposition.

Et c’est partant de ce fait qu’il me plait de saluer Lionel Zinsou, père fondateur de la fondation Zinsou. L’année dernière ou en 2006, ce dernier a réussi à racheter à prix d’or le trône du roi Béhanzin en France lors d’une vente aux enchères. On peut peut-être émettre des doutes sur l’authenticité du trône. On peut peut-être penser qu’il s’agit d’une copie. Mais c’est déjà assez évocateur de savoir que quand il a entendu parler du trône du roi Béhanzin, il s’est précipité pour l’arracher aux autres potentiels collectionneurs.

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